Affaire Seznec : La piste de Lormaye

Pierre Quémeneur a-t-il été assassiné par Guillaume Seznec à Lormaye ?

La piste Gresteau

 

 

 

 

 

L’an 2000 et la piste de Lormaye : ORIGINES « PISTE GRESTEAU »

 

Après une longue réflexion, Mme  Gresteau  va enfin raconter à Denis Seznec l’histoire du grand-père de son mari, le maçon Georges Martin. Elle en aura tout le temps, car Denis va l'écouter un long moment. Puis, il va m’envoyer un mot : « téléphone-moi d’urgence ». Ce que je fais, dès que je le reçois, soit le lundi 18 septembre au soir. 

 

Dans son enthousiasme, Denis fait paraître dans la circulaire de France JUSTICE N° 15 en date du 17 octobre 2000 un article important : « Piste QUEMIN : du nouveau ». Denis Seznec me préviendra par téléphone de la parution de la dite circulaire le mercredi 18 octobre !!!

 

Il est complètement enthousiasmé puisque l’on peut lire en début d’article :

« Une certaine Mme Gresteau, accompagnée de sa petite fille Romy, ont rencontré DS le 15 septembre dernier pour lui faire part de ceci… »

Et en fin d’article :

« Ce nouveau témoignage est si troublant que NOUS avons demandé à Liliane LANGELLIER, ancienne journaliste de L’EXPRESS et membre de F.J. qui habite la région, d’enquêter. Eventuellement Roger-Marc MOREAU, le détective, viendra l’assister. »

 

C’est donc clairement à la demande de Denis que je reprends l’enquête.

 

Je suis méfiante. Mais je vais quand même prendre contact et déjeuner chez le beau-frère et la belle-sœur de Denise Gresteau : Madeleine et Pierrot qui, anciens vanniers, habitent le village de mon enfance, le mercredi 8 novembre 2000. Pour qu’ils me racontent : Qui est Denise Gresteau, ainsi que la généalogie complète de la famille du maçon Georges Martin.

 

 Un an plus tard, le 15 novembre 2001, dans la circulaire de France JUSTICE N°18, on peut lire « Liliane LANGELLIER recherche toujours des éléments concernant la piste QUEMIN »

 

Le sort va décider que l’enquête devra se dérouler ailleurs et autrement.

 

Chaud devant la piste de Lormaye : l’été de la canicule

 

Nous sommes début juillet 2003. Je suis allée au Centre de Rééducation de Gasville visiter l’abbé Le Bars, finistérien, ancien aumônier de mon époux, qui avait co-célébré notre mariage. C’est une pancarte qui va décider de la suite de ma journée. A un croisement, j’hésite devant le nom de « Chartres » quand j’aperçois celui du village où je sais que Colette Quemin habite désormais.

Impossible de me souvenir de son nom d'épouse. La mairie va fermer mais j’ai le temps d’y faire un saut. Le renseignement m’est rapidement donné. Ce qui me permet de leur signaler que je vais aller voir cette dame. L’employée me balance, souriante : « Si vous faites chou blanc, vous pourrez toujours boire un coup, il y a un café juste à côté de chez elle ! »

C’est un lourd pavillon de banlieue, peu avenant, avec ses volets électriques baissés. Je sonne en vain. Puis je pense : « jardin » ? Et j’appelle le nom de la propriétaire. Elle est effectivement dans son jardin et vient, souriante, au-devant de moi. Je ne mens pas. « Je suis journaliste. J’ai besoin, pour un article, de photos de votre père et de votre grand-père. »

Colette me laisse entrer et me dit : « Venez au frais ». Elle va m’ouvrir ses albums et m’encourager à prendre ce qui m’intéresse. Je suis stupéfaite. Joyeuse comme une enfant. Je n’ai jamais vu Jean-Louis Quemin en photo. Et là, il y a le choix…….. Par contre rien sur son grand-père. « Si vous saviez, s’excuse-t-elle, mon grand-père, je l’aimais. Il était gentil avec nous. » Et elle me raconte de nouveau les terribles brutalités (en tous genres) que son père lui a fait subir. « J’ai beaucoup souffert, vous savez, car je me rebellais. Je ne me laissais pas faire. Ma sœur aînée Suzanne était sa chouchoute car elle acceptait tout. Elle montait sur le tracteur et moi je devais gratter les parquets. Je n'étais heureuse que lorsque je repartais en pension à Maintenon. »

J’ai choisi surtout une photo où le fils Quemin a l’air bien peu aimable.Après les avoir faites dupliquer, je lui renvoie ses photos avec des fleurs. Le récit de son enfance et de son adolescence m'a terriblement émue.

Mais maintenant j’ai la matière pour contacter « L’Echo Républicain » et faire un appel à témoins. Car dans les termes de la circulaire de France Justice N° 15 du 20 octobre 2000, je ne peux savoir qui du père ou du fils est concerné, car ils sont désignés sous l’appellation : « Les Quemin » :

 

Piste Quémin : du nouveau
Une certaine Mme Gresteau, accompagnée de sa petite-fille Romy, ont rencontré DS le 15 septembre pour lui faire part de ceci : le grand-père de son époux, entrepreneur de maçonnerie, avait été embauché par les Quémin en juin 1923 à Nogent-le-Roi. Ceux-ci lui avaient demandé de construire des fondations pour leur porcherie. Le lundi suivant, alors que les travaux n’avaient pas encore commencés, les fondations étaient déjà coulées. L’artisan n’eut pas le droit de se rendre sur le chantier – « Ne vous occupez pas de ça ! » - et fut réglé entièrement, sur le champ, par les Quémin. Le maçon fut intrigué par leur comportement, d’autant plus qu’ils n’avaient pas l’habitude de régler facilement leurs dettes. Lorsque l’on sait que la disparition de Quémeneur s’est produite, en juin 1923, dans la région (la gare de Houdan n’est qu’à une vingtaine de kilomètres), et que des fouilles ont été entreprises par les gendarmes chez les Quémin - ils avaient, en effet, une « réputation de tueurs » - parce qu’ils avaient été vus par un témoin, M. Viet, traînant un corps la nuit, en début du mois de juin, dans leur propriété, près de leur parc à cochons, justement, on ne peut qu’être intrigué.

A l’époque, Marie-Jeanne Seznec - alertée en 1926, soit trois ans après le témoignage de Viet ! - s’était alors déplacée à Nogent-le-Roi et avait appelée la population à l’aider dans ses recherches. L’Action républicaine, le grand journal de la région, avait même fait de nombreuses Une sur ce rebondissement. (Lire NLS, nouvelle édition p. 267). L’artisan, parent de Mme Gresteau, n’a jamais parlé, par peur d’avoir des ennuis probablement. Ce nouveau témoignage est si troublant que nous avons demandé à Liliane Langellier, ancienne journaliste de l’Express et membre de FJ, qui habite la région, d’enquêter. Eventuellement, Roger-Marc Moreau, le détective, viendra l’assister. A suivre.

 

Un autre appel est lancé dans la circulaire N° 16 de novembre 2001 :

 

Piste Quemin

Liliane LANGELLIER, recherche toujours des éléments concernant la piste Quémin. Dans notre circulaire n°15 nous avions évoqué cette piste : Georges MARTIN, entrepreneur de maçonnerie, avait effectué des travaux chez les QUEMIN à Nogent-le-Roi en juin 1923. Ceux-ci lui avaient demandé de construire les fondations d'une porcherie. Mais quelques jours plus tard, les fondations avaient été déjà coulées alors que Georges MARTIN n'avait pas entamé les travaux. L'artisan n'avait pas eu le droit de se rendre sur le chantier et fut réglé sur le champ par les QUEMIN. Ceux-ci ont toujours été soupçonnés d'avoir joué un rôle dans la disparition de QUEMENEUR. C'est pourquoi Liliane LANGELLIER, ancienne journaliste de L'Express qui habite la région, explore cette piste pour le moins troublante. Elle a notamment retrouvé les petits-enfants du maçon. Elle recherche activement de nouveaux témoignages. Contact : 02 37 51 11 86.

 

Les textes ne m’ont pas été soumis auparavant. Et je vois d’un assez mauvais œil mon numéro de téléphone en liste rouge publié ainsi aux quatre coins de la France !

 

Mais il faut continuer. Ne pas buter sur des broutilles. L’article va paraître dans « L’Echo Républicain » du mardi 29 juillet 2003, sous le titre racoleur : « Lormaye : Une Nogentaise a enquêté sur l’affaire Seznec » : « Pour moi, l’assassin habitait à Lormaye ».Et encore, j'ai pu négocier, car le titre prévu était tout simplement : "L'assassin habitait à Lormaye". J'ai arraché de haute lutte un "Pour moi......."

Mon appel à témoins se trouve en dernier paragraphe : « Je demande publiquement que chacun fasse appel à sa mémoire ou à la mémoire de ses proches, et prenne la responsabilité de dire ou d’écrire ce qu’il sait ou ce qu’il croit savoir sur les supposés travaux du maçon Georges Martin. La clé de l’affaire est peut-être cachée là. » L’adresse indiquée est celle de la mairie de Lormaye.

Il m’a fallu céder. Me laisser prendre en photo avec en main droite l’ami Jean-Louis Quemin et en main gauche la nouvelle édition du livre de Denis Seznec. « Sinon : pas d’appel à témoins » a précisé la direction de la rédaction.

Le journaliste, Christophe Ramauger, a écrit un bon article sous forme de questions/réponses. J’y parle de Chautemps, de son appartenance à la franc-maçonnerie. De Bonny et de « mes » Quemin bien sûr.

En cette fin de juillet, ce numéro de L’Echo est un succès total. A tel point que France 3 Orléans contacte dès le mercredi 30 juillet la mairie de Lormaye pour me joindre d’urgence. Et me donne rendez-vous à 13 h 30. Nous voilà donc partis pour la tournée des fermes Quemin avec Julie Caballé et Yves Legloa. Rue de Verdun, c’est le pont de l’Auge qui nous intéresse. Mais cela sera moins simple pour la ferme de Chandres  (on est en pleines moissons) qui est désormais la propriété de Monsieur le Maire. Que je connais bien. Et qui a déjà accepté d'être pris en photo, pour mon article de novembre 1992 dans "L'Action Républicaine", devant sa ferme

Le petit reportage passe aux infos régionales sur France 3 Centre le 30 juillet au soir.Je vais lourdement payer et l'article et le reportage. Jalousies locales ? Vengeance sur certains termes utilisés (pourtant à raison et avec preuves à l'appui dans le corps de l'article). Je ne le saurai jamais. Denis Seznec fera reproduire la fameuse page de L'Echo Républicain et la joindra à la Circulaire de France Justice N° 22 du 10 novembre 2003 :

 

"La piste Quemin est relancée grâce à Liliane Langellier, une ancienne journaliste de L'Express. En 1993, la rédaction de TF1 s'y était intéressée. Nous avons reproduit la page de L'Echo Républicain du 29 juillet. France 3 en a fait un large écho dans ses journaux télé."

 

Ce qui me vaudra un nombreux courrier.De tous les coins de la France. L'un de mes correspondants du Midi, dont le fils est prêtre, va même me photocopier et m'envoyer le livre "La dictature des loges".

 

Des bienfaits de la Bretagne

 

J’ai prévu de partir à l'hôtellerie de l'abbaye Saint-Michel de Kergonan, chez mes chères Bénédictines de Plouharnel (Carnac). J’ai besoin de silence et de paix. J’ai aussi besoin de plage, de sable, de mer, de ciel breton et surtout de voir d’autres gens, de penser à autre chose. Un petit matin, sur le parking de l’abbaye, une dame m’arrête : « Je vous ai vue dans ma cuisine, j’en suis certaine. J’habite Nantes ». Je reste souriante mais un peu confuse car je n’ai jamais mis les pieds à Nantes ?????

« Mais si, et je suis bien d’accord avec vous, pourquoi, alors qu’ils étaient radins, auraient-ils  payé les travaux et coulé eux-mêmes les fondations ». Je viens de comprendre que le petit film a été diffusé sur France 3 Bretagne (j’apprendrai plus tard qu’il a été en fait diffusé en « national »). Cela ne me choque pas. Après tout, l’affaire Seznec n’appartient-elle pas d’abord aux Bretons ?

 

Je suis trop joyeuse pour être choquée de quoi que ce soit, d'ailleurs. J'ai enfin fait la connaissance de Madeleine Fémeau, mon principal témoin. Elle est aussi en vacances dans le Morbihan, chez l'un de ses enfants, à 35 km de Plouharnel. Onze années à correspondre et se voir enfin. C'est une femme passionnée. La voir et l'entendre vous  donne des réserves d'adrénaline pour l'année à venir. La passion n'a pas d'âge. Et le monde est si tiède ! J'ai apporté copies des journaux, retranscription de sa première et longue interview. Le mot "partage" est léger pour cet instant unique que nous avons vécu.

 

L’iode et le beurre salé m’ont requinquée. Le silence et la prière des moniales m'ont apaisé l'âme et remis le cerveau à l'endroit. La saine nourriture de l'hôtellerie, la plage de Saint-Colomban au quotidien , et les petites  ballades au coucher du soleil sur les sentiers de douaniers m'ont retapé le physique. Et je comprends alors mon erreur : j’aurais du téléphoner moi-même directement à Danny Gresteau. La Guadeloupe, ce n’est quand même pas ravitaillé par les corbeaux. Je vais donc, dès ma rentrée, fin août, remédier à cette faiblesse dans mon enquête (toujours vérifier ses sources soi-même) et joindre par deux fois Danny Gresteau ,. nogentaise très connue qui travailla à la Poste et habita à Lormaye, au 45 bis, rue Alexandre Goislard, entre l'école et la route de Maintenon (proche du pont de Noailles) une superbe maison, maison construite par l’entreprise de son mari « Les Constructions Nogentaises »,  avec, originalité, 52 tonnes de granit rose issues de la clairière de La Clarté à Ploumanach dans les Côtes du Nord. J’enregistre et je décrypte. Je ne suis pas déçue du résultat !

 

Lire toute la retranscription de l'interview sur : Affaire Seznec : la piste de Lormaye : "Ce que vous cherchez à droite est à gauche !"

 

« Le grand-père de mon époux, maçon de son état, avait été pressenti pour construire une porcherie chez QUEMIN Fils. Ce devait être en juin 1923 ( ? ).

Dans ce temps-là, on travaillait le samedi et le lundi. Ils ont donc creusé les fondations de cette porcherie le samedi matin. Quand ils sont revenus pour couler le béton – qui se faisait à la main – c’était déjà fait !!! Et le grand-père a dit :

« Tiens, ben qui c’est qu’a fait ça un dimanche ??? » On lui a répondu : « Toi, tais ta gueule ! ça ne te regarde pas. Toi, tu seras payé, fous-nous la paix avec ça. »

Et c’est tout.

« La mère de mon mari racontait toujours, continue Denise GRESTEAU, que son père avait dit à tous ses enfants : « Plus un mot là-dessus. Vous risquez votre vie !!! » Alors plus personne ne disait rien. Ou alors sous le manteau ou dans les réunions de famille. »

 « Jean-Louis QUEMIN, lui, il est allé raconter qu’il avait eu une épidémie, qu’il avait enterré des cochons pour pas que les microbes s’en aillent, et que comme ça pressait, il avait coulé le béton le dimanche… »

Et Danny Gresteau d’ajouter :

« Ce que vous cherchez à droite est à gauche (comprendre en allant vers Maintenon ). C’est Georges Martin qui a construit la ferme de Chandres : c’est la maison qui a un premier étage avec un toit à trois pentes.

Le moulin de Chandres a été démoli(ndlr : elle se trompe, c'est "le moulin de Paris"). C’est la maison qu’il a construit. Un genre de maison de maître…. »

 

Il était donc bien question dans son témoignage du « fils Quemin » et de la ferme de Chandres.

 

JLQ la frime à la ferme

 

La ferme de Chandres (avant 1914 ?) avec Jean-Louis "en patron" à la porte

 

LA-FERME-DE-CHANDRES-EN-1992.jpg

La ferme de Chandres en 1992

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