Affaire Seznec : La piste de Lormaye

Pierre Quémeneur a-t-il été assassiné par Guillaume Seznec à Lormaye ?

Interlude

 

 

 

INTERLUDE

 

Une nouvelle vie pour la piste de Lormaye

 

En ce tout début d’automne, je ne vais pas seulement enquêter. Je vais aussi « jouer les attachées de presse ». Mon enthousiasme est tel que je suis dédoublée.

Avant la venue de Denis Seznec à Nogent-le-Roi, je vais me battre pour obtenir des articles des deux principaux journaux locaux : « L’Echo Républicain » et « La République du Centre ». Je vais enregistrer avec, Christiane Hieaux, la femme du maire de Dreux, une émission consacrée à « la lutte des femmes dans l’affaire Seznec » sur Radio Grand Ciel, radio catholique locale. Emanation de Radio Notre Dame. Au grand nombre d’auditeurs sur notre territoire. France 3 Centre va se déplacer pour filmer Denis dans les anciennes fermes du fils et du père Quemin le matin même de la dédicace de son livre.

Je vais vivre un grand chagrin : mon père ne pourra pas lire mon article sur Quemin/Quemeneur. Sa dernière attaque l’a privé de sa raison et il sera hospitalisé jusqu’à sa mort en janvier 1993.

Je vais vivre une grande joie : mon travail a été remarqué par le Président de la Chambre de Commerce de Chartres qui décide de m’engager comme attachée de presse.

Fin décembre 1992, une équipe de TF1 cornaquée par Bernard Nicolas vient tourner à Lormaye. Denis Seznec les accompagne. Bernard est chaleureux et la meilleure gnôle lui est réservée par Pierre et Paul. Il fait un froid de gueux. Deux témoins ont accepté d’être filmés sur le pont de l’Auge : Marcel Polvé et Robert Lahaye.

Nous nous retrouvons avec toute l’équipe pour déjeuner au « Plat d’Etain » à Houdan. Dernier lieu avant le grand marais de l’incertitude.

Première déception : ce reportage  - qui aura duré une journée entière - sera réduit à trois minutes et la piste de Lormaye ne sera pas évoquée sur TF1.

Pourtant les témoignages spontanés affluent. Difficile de faire le tri entre mythe et réalité. Grand nombre d’anciens penchent à Lormaye pour la thèse de l’enterrement du corps de Quemeneur sous une dalle de béton, sous une fontaine dans la ferme de Jean Quemin. Fontaine proche de l’Auge.

Difficile de leur dire que les Quemin étaient bien trop malins pour garder chez eux les restes du conseiller général. Pour preuve : ce que Georges Viet a vu pourrait sans doute correspondre à une évacuation d’un corps destiné à être chargé par un véhicule sur le pont de l’Auge. D’autres sont obsédés par les fameux coches de Quemin : « Ils lui auront donné le corps à manger, seule la tête restera ». Je vais donc m’informer des nourritures porcines…….

L’année 1993 s’écoule entre témoignages divers et recherches personnelles. Je commence enfin à prendre du temps pour lire plusieurs livres sur l’Affaire. Celui de Denis Langlois me séduit par son style inimitable.

Parallèlement, j’entreprends des recherches sur le gouvernement de l’époque. « Vertueuse IIIe République » ! Je m’adresse directement à la documentation de l’Assemblée Nationale.

J’étudie à fond l’histoire de la Franc-Maçonnerie. Dont Denis Seznec me parle beaucoup.

J’ai en ma possession les enregistrements des émissions d’Europe 1 de Janvier 1979. Et surtout celle d’avril 1979 qui m’a été envoyée par une aficionado de l’affaire. Je vais les écouter et les ré-écouter.

Peu à peu, me vient la certitude que Guillaume Seznec n’a pas pu parler. Qu’il n’a pas tout dit. Qu’il a été menacé sur sa famille et sur ses biens.

A la fin du printemps 1993, une drouaise, Madeleine Bellevault, ancienne secrétaire de mairie de Tréon me contacte pour témoigner sur le puits de Chambléan. Elle est persuadée que le corps de Pierre Quemeneur gît au fond de ce puits en forêt du bois des Brosses près de Garnay. J’entends cette phrase qui me sera souvent répétée : « je ne veux pas partir sans avoir libéré ma conscience ».

Et finaude d’ajouter : « Il peut avoir été tué à Lormaye et enterré à Chambléan, non ? » D’autant plus que cette parcelle de terrain appartenait à un certain Langevin, marchand de bestiaux à Tremblay-le-Vicomte et que le propriétaire du château de Marmousse et de ces bois, le sieur Louis Thureau-Dangin, que je rencontrerai courant mars, n’est guère d’humeur facile. Il a des gens qui surveillent ses terres, fusils en mains. Et cette parcelle-là, il m’avouera ne jamais avoir pu l’acquérir.

Madame Bellevault veut témoigner à la gendarmerie. Malgré mes avertissements, elle ne renonce pas. Cela me vaut de connaître fort rapidement le commandant Michel Laquerbe des Renseignements Généraux. Qui vient me rencontrer à Chartres. Le 25 mai 1993. «70 ans plus tard, ça ne s’invente pas ! » Cela me permet également de réaliser combien cette affaire est encore sensible.

En 1994, j’accepte d’intégrer en correspondante locale « La République du Centre ». Mais je suis marquée par l’affaire Seznec. On ne sait pas mon nom, on dit souvent « la petite journaliste de Seznec ».

Le vendredi 19 avril 1996, Denis Seznec vient à Coulombs pour sa première conférence sur l’affaire. La salle est bondée. Et le public enthousiaste.

« Prochain épisode le 17 juin……. » nous dit-il.

Et c’est un nouvel échec.

Il me balance alors le nom de Camille Chautemps. L’homme politique concerné selon lui. J’obtiens un curriculum vitae très complet de la documentation de l’Assemblée Nationale. Mais tout me semble trop clair. Et pour la toute première fois, comme Chautemps a vécu aux Etats-Unis et épousé en secondes noces une pianiste américaine, je joins à Washington, La Library of Congress. Internet vient juste de sortir. Tout est devenu beaucoup plus facile.

 

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