9 Juin 2013
"Une promesse c'est une dette"
Proverbe guadeloupéen
Brest, rue de Siam.
Je n'ai pas l'intention de découvrir si ces promesses de vente étaient vraies ou fausses. Suffisamment d'experts - officiels et officieux - se sont penchés sur ce sujet. Et nous en sommes toujours au même point. Je souhaite juste revenir sur la chronologie de leur apparition dans notre pièce de théâtre...
Voilà la première série des promesses - selon les dires de Guillaume Seznec - qui apparaissent le mardi 22 mai. Lire sur ce blog :
Affaire Seznec : Spécial 90ème anniversaire : mardi 22 mai 1923
Elles apparaissent. Et les dollars disparaissent. Nous sommes dans un spectacle de pure magie.
La scène de l'échange d'or se déroule à une terrasse de café rue de Siam. La rue idéale à Brest pour faire les choses discrètement....
Après (cf Bernez Rouz en page 65) Guillaume s'emmêlera les pinceaux (et nous en verrons de toutes les couleurs) pour dire, dans une seconde version des faits, "que c'est dans la Panhard entre Brest et Lesneven qu'il remit les dollars à Quéméneur."
Revenons à la naissance de nos promesses de vente : "Cette promesse de vente a été rédigée en deux exemplaires sur timbre et nous l'avons signée. Je possède une des expéditions."
Deux exemplaires et que de tracas !
On aurait pu penser que Guillaume, tout heureux de l'achat de la propriété de Traou-Nez en Plourivo, en fasse immédiatement part à son épouse Marie-Jeanne dès sa rentrée chez lui le 22 mai au soir. Mais là : que dalle ! Pas un mot non plus à Jenny Quéméner, le 4 juin, quand elle vient à la scierie de Morlaix chercher des nouvelles de son frère.
On va devoir attendre la seconde scène du Havre, celle du 20 juin, pour entendre à nouveau parler de la promesse. Dont un exemplaire se trouve dans la valise laissée dans la gare. Lire sur ce blog :
Affaire Seznec : Spécial 90ème anniversaire : mercredi 20 juin 1923
Et puis, le 28 juin, alors que Guilaume est convoqué à La Sûreté, rue des Saussaies, il va miraculeusement sortir de sa poche le deuxième exemplaire de la dite promesse pour le remettre au commissaire Vidal. C'est connu, vous comme moi, quand on vend ou achète une maison, on se balade toujours avec la promesse de vente en poche, isn't it ?
Ce qui m'intrigue au plus haut point c'est bien la journée du 13 juin. Et si c'était justement cette journée-là qui avait vu la naissance de la seconde série des promesses ??? Ou plutôt entre le 13 et le 20 juin. Avec la machine à écrire que le fils Jacob remarque sur le dos de Guillaume à son retour à Plouaret au petit matin du 14 juin. Non, dites-moi que j'ai de la fièvre... Ou que je rêve...
Fausse promesse de vente de Plourivo.
Exemplaire remis au commissaire Vidal par Seznec.
Fausse promesse de vente de Plourivo.
Exemplaire découvert dans la valise du Havre.
En tout cas, ce que je viens de découvrir, grâce à la mise sur Internet des archives de Me Denis Langlois, c'est que Guillaume Seznec, lors de son procès, n'a jamais fait demander de contre-expertise des promesses de vente :
"Dans la valise de Quémeneur abandonnée dans la salle d’attente de la gare du Havre, la police découvre notamment une promesse de vente sur papier timbré en date du 22 mai 1923 par laquelle Quémeneur s’engage à céder à Seznec pour la somme de 35.000 francs une propriété qu’il possède à Plourivo (Côtes-du-Nord). Seznec, interrogé par la police, confirme cette promesse de vente et en présente un second exemplaire. Devant le prix particulièrement faible, il affirme qu’il a versé un dessous-de-table en dollars équivalant à 65.000 francs. Ces deux promesses de vente eurent une importance primordiale dans l’affaire. Elles furent considérées par les experts comme des faux et certaines mentions manuscrites dont sa signature furent attribuées à Seznec. Celui-ci soutint toujours qu’il s’agissait d’actes authentiques et ne demanda pas officiellement de contre-expertise."
Et Me Langlois d'ajouter :
"Jean Favard (ndlr Conseiller-rapporteur de la Commission de Révision en 1996) rapporte que, lors du délibéré de 1996, il proposa à ses collègues de la Commission de dire que "après avoir constaté que Seznec n’était pas innocent des faux et qu’il avait caché la mort de Quémeneur, il n’était pas inenvisageable qu’il ait pu ne pas être un meurtrier" (page 91)."
Guillaume Seznec n'est peut-être pas innocent des faux. Mais la question pour un champion reste : les a-t-il composés de son plein gré ou lui a-t-on tenu la main ?
Liliane Langellier
P.S. Relire quelles passions ont déchaîné ces promesses de vente ici : Affaire Seznec : Guillaume Seznec faussaire ?
P.S.2 Concernant le parcours retour de Guillaume à Plouaret, on me glisse dans l'oreillette gauche :
"Partir de Saint-Brieuc pour Brest avec des pièces de rechange pour réparer un véhicule à Plouaret, on peut le voir dans un film, mais pas dans la vraie vie (200 km en train et 35/40 km en vélo soit une journée de 8 h....)"