Affaire Seznec : La piste de Lormaye

Pierre Quémeneur a-t-il été assassiné par Guillaume Seznec à Lormaye ?

Affaire Seznec : le jour où... (2ème partie)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

CASSETTE LE ROUX

 

 

 

 

 

 

FIN MAI 1923 … Seznec et Quemeneur prennent la route de Paris. Le but est de vendre la vieille Cadillac de Seznec et de traiter si possible un marché plus important.

Dans l’affaire, Quemeneur apporte les finances et Seznec la connaissance technique des véhicules, mais aussi, on l’a vu, les contacts avec la filière…

 

Denis Seznec :

« Mon grand père connaissait la mécanique. C’est pour ça que Quemeneur s’associe avec mon grand père qui est censé le conseiller. Mais à l’époque, un type qui venait de province à Paris, mais il se faisait arnaquer… D’ailleurs même dans l’affaire Seznec, dans le voyage en automobile, Quemeneur conseille à mon grand père de faire réparer la voiture, qui a que des pannes, la Cadillac, de pas la faire réparer à Paris parce qu’il va se faire arnaquer ! »

 

Partie à 5 heures du matin de Rennes, la Cadillac arrive à Dreux en milieu d’après-midi. Les pannes se sont multipliées. Les deux hommes doivent réparer. C’est à partir d’ici que Liliane Langellier, une journaliste indépendante, a suivi les derniers instants où les deux hommes ont été vus ensemble. Première étape : le garage Hodey :

«  Il a une importance capitale parce qu’effectivement ils ont une première panne qu’Hodey va réparer, et puis ils vont retomber en panne une deuxième fois en grande rue. Et là, il va carrément les dépanner et ramener la voiture au garage et là, la panne va être très longue puisqu’ils vont rester entre 16 h 30 et 19 h 45 à Dreux, quand même. Danc les dépositions d’Emile Hodey, lors du procès, ont été extrêmement importantes. »

 

Emile Hodey propose aux deux hommes d’aller sur Paris en train. Ce qu’ils refusent. Ils sont à 80 kilomètres de la capitale, ils pensent encore pouvoir arriver dans la nuit. Ils font route vers Houdan où ils s’arrêtent pour dîner à l’Auberge « Au Plat d’Etain ».

 

Liliane Langellier :

« Quemeneur a téléphoné. Donc on appelait et on vous rappelait de La Poste. A 21 heures, c’est plus possible. Donc, c’est avant 21 heures qu’ils étaient « Au Plat d’Etain ». On en est sûr. Par contre, on n’a jamais pu retrouver la fiche de l’appel et on ne sait pas à qui il a téléphoné. »

 

Le mystère de la disparition de Pierre Quemeneur commence ici « Au Plat d’Etain » sur ce coup de fil énigmatique. Il ne fera que s’épaissir. Les deux hommes reprennent la route et se dirigent vers la gare de Houdan.

 

Liliane Langellier :

« Quemeneur avait très envie de prendre son train, il était très pressé. Donc, ils sont rentrés dans la cour de la gare, ils ont fait un demi tour et… Il était trop tard. Mais on est certain qu’ils sont venus ici parce que des témoins ont dit : « Ils étaient deux personnes dans cette voiture. Personne n’est descendu. Ils sont partis très très vite. Ils ont fait un demi tour dans la gare. «  Pensez, Quemeneur, à ce moment-là, a du se dire : « Non, il est trop tard, et je vais aller rejoindre la gare de Dreux. »

 

Quemeneur a-t-il pris le train à Dreux pour Paris ? Seznec l’affirme. Mais on le trouve seul le lendemain à La-Queue-lez-Yvelines. Il répare sa voiture. Et bizarrement à 48 kilomètres de Paris, il retourne à Morlaix. On ne reverra plus jamais Quemeneur.

 

FIN JUIN 1923 : un mois après la disparition du conseiller général, les policiers de la Sûreté sont sur place et procèdent à une reconstitution avec Seznec. Celui-ci, confronté aux témoins, s’embrouille dans ses explications. Le commissaire Vidal est alors persuadé que Seznec a assassiné Quemeneur pour lui voler son argent et il a dissimulé le corps dans un étang. La presse privilégie un coup monté par les complices. Le corps aurait été jeté dans la Seine à Mantes la Jolie ou dans un puits à Sion les Mines. Où un cadavre sans tête est découvert en juillet 1923.

 

Liliane Langellier est, elle, persuadée, que Quemeneur a été tué à Lormaye, à vingt kilomètres de Dreux, dans la propriété d’un marchand de bestiaux :

« Ici, on dit pas à Lormaye : « L’affaire Seznec », on dit « Quemin-Quemeneur », parce que les Quemin sont vraiment pour tous les Lormaisiens, on va dire vraiment, les accusés du crime de Quemeneur. C’est venu du témoignage de Georges Viet. Qui, comme les Quemin avaient des propriétés de l’autre côté aussi de Lormaye, dans la nuit du 25 au 26 mai 1923, Georges Viet, en rentrant de Coulombs, va voir quelque chose d’étrange qui se passe dans un petit fossé herbeux qui s’appelle le fossé d’Auge, et la chose étrange, c’est un cadavre qu’on passe par-dessus le mur d’une propriété des Quemin. Il va raconter ce qu’il a vu. Et il va y avoir des fouilles en septembre 28. Des fouilles qui ont été importantes par la gendarmerie, par la… »

« Qui n’ont rien donné ? »

« Qui n’ont rien donné, parce que, d’après moi, le cadavre avait depuis longtemps été déplacé. Tout le monde pense qu’il a été tué ici et que le cadavre a été enterré dans une porcherie. »

 

Dans la région de Dreux, on pense donc que le cadavre de Pierre Quemeneur est soit dans un étang, soit dans un puits, soit dans la Seine ou soit dans une porcherie.

 

D’autres pensent que Quemeneur a effectivement pris le train pour Paris, et c’est au retour, dans sa propriété de Plourivo qu’il aurait trouvé la mort.

 

Manoir de Traou-Nez (Musique bretonne et visite touristique) :

« Son propriétaire, au moment des faits, en 1923, Pierre Quemeneur semble avoir été assassiné au cours d’un voyage à Paris. Guillaume Seznec, bénéficiaire d’une promesse de vente de la propriété, est accusé du crime et condamné au bagne à perpétuité sans qu’aucun cadavre n’ait été retrouvé. »

 

Le manoir de « Traou Nez » est aujourd’hui un haut lieu touristique où on évoque « L’affaire Quemeneur Seznec ». En octobre 1924, on parle du procès dans les journaux. Les marins d’une gabarre confient au gendarme Müller de Pontrieux qu’ils ont entendu des coups de feu à Traou Nez le 24 mai 1923.

Sur le procès-verbal, on peut lire : « renseignements judiciaires relatifs à l’Affaire Seznec Quemeneur, actuellement en cours d’assises à Quimper. » Ce document transmis par le juge Hervé au Parquet de Guingamp ne sera jamais communiqué aux jurés de Quimper.

En 1931, le juge Hervé quitte la magistrature et reprend l’enquête. Pour lui, les autorités judiciaires ont délibérément caché ce fait nouveau qui aurait pu innocenter le bagnard. Pour la plupart des « Seznecologues », Quemeneur a été tué à Plourivo par son frère gérant du lieu. A l’appui de leurs convictions, ils montrent des balles qui indiquent que des faits troublants s’y sont déroulés.

 

 

Michel Keriel – auteur de « Seznec, l’impossible réhabilitation » ed. MEB :

« Quemeneur qui était resté à Paris a fait ses petites affaires, on ne sait pas ce qu’il a fait. Il est rentré par le train, s’est arrêté à Guingamp, il a pris un taxi, il est allé à Plourivo. Là, il aimait les femmes, son frère, Louis, aussi. Ils se sont battus. Il avait un revolver. Voilà ! Ce qu’ont entendu les marins de la gabarre à ce moment-là : les deux coups de feu. »

 

Patrick Bocquet – avocat, ancien comédien dans la pièce de théâtre :

« A 11 h 23, il avait été pris en voiture par un chauffeur de taxi qui l’avait vu descendre de Guingamp pour le conduire à Plourivo et la nuit même des coups de feu étaient tirés au bord de la propriété et c’étaient des marins de la gabarre « Marie-Ernestine » qui voyaient deux hommes et une femme sur la berge et un homme tomber. Donc, il y a tout de même énormément d’indices qui laissent à penser que Quemeneur a pu être tué au sein même de sa propre famille. Il y a des indices qui laissent à penser que cette hypothèse est vraisemblable et malheureusement n’a pas été examinée avec le sérieux qu’elle méritait. »

 

 

Le casse-tête de l’affaire Seznec rebondit en 2003. Un nouveau livre vient ajouter aux évènements de Plourivo une page supplémentaire. Dans les années cinquante, la gendarmerie a enquêté sur la découverte d’un crâne près de Traou Nez. Les photos ont été trouvées chez le fils du gendarme qui dirigea les recherches. Le procès-verbal a disparu.

 

Daniel Le Petitcorps, auteur de « Seznec, en quête de vérité » ed. Le Télégramme :

 « On ne retrouve pas le fameux P.V. dit P.V. 674, nous avons bien trois clichés. Nous avons trois clichés et un bordereau d’accompagnement qui précise qu’un P.V. a été établi mais on ne trouve pas trace de ce P.V. »

 

 

Des coups de feu dans la nuit, des ossements qui disparaissent, des procès-verbaux de gendarmerie occultés, Plourivo est un haut lieu du mystère Quemeneur. Mais il faut savoir qu’en 1923 aucune enquête n’a été diligentée dans ce lieu qui a fait pourtant l’objet d’une promesse de vente entre Quemeneur et Seznec. On a accusé Seznec d’avoir fait un faux en écriture.

 

Autre lacune de l’Instruction, à Morlaix, autour de la propriété de Seznec, aucune enquête de proximité n’a été faite.

 

Madame Yvonne Le Nen, voisine des Seznec :

« J’habitais un petit plus bas. Face à la maison Seznec. Et j’étais tous les jours là. On jouait avec eux. C’était des amis, quoi !

- Et vous étiez étonnée, à l’époque, que personne ne vous avait interrogés ?

- Je ne peux pas dire… mais j’ai entendu mes parents dire que l’Affaire avait été mal instruite car tous les voisins, personne des voisins n’avait été questionné… »

 

Madame Françoise Rams, commerçante à Morlaix :

- « Madame, racontez-nous un peu dans quelles circonstances, vous avez connu Seznec et Quemeneur à l’époque ?

- Dans quelles circonstances ?? Bah, ils passaient là. Il habitait sur notre passage, puisque nous habitions au bout de la rue, là. Et alors il venait aussi comme client qu’il venait discuter dans la salle, prendre un petit verre, et ils discutaient…

- Vous aviez l’impression, à l’époque, qu’ils faisaient un trafic de voitures, qu’ils traficotaient entre eux ?

- On parlait de ça, n’est-ce pas, qu’ils trafiquaient des Cadillac, non ? »

 

 

40 ans après, le mystère des Cadillac reste entier. Le dossier de justice est pourtant clair. Au début de l’enquête, Seznec parlait facilement du but de leur voyage à Paris : vendre des Cadillac pour la filière soviétique. Sa voiture devait servir comme échantillon d’un vaste trafic. Pour traiter de cette affaire, Quemeneur et Seznec avaient rendez-vous avec un certain « Gherdi » qui avait son quartier général au Café « Au Tambour », avenue de la Bourdonnais.

 

Denis Seznec :

« Il a au moins 60.000 francs Or sur lui. Ce qui est une très grosse somme. Le Café « Le Tambour », c’était un café très suspect, dans le sens où il y avait des margoulins qui gravitent autour. Quemeneur qui est censé venir – qui est censé, car personne ne peut le prouver – dans ce café, s’il avait de l’argent liquide sur lui, moi, je vois le tableau, ce type, c’était le client, comme on l’appelle de nos jours, quand on a quelqu’un qui est à faire, un faisan, quoi ! »

 

Pendant les quinze premiers jours de l’enquête, les policiers, suivis par les journalistes, explorent la piste du gang des Cadillac. Plusieurs fois les journaux annoncent des arrestations, puis, à la mi-juillet, une chape de plomb tombe sur l’enquête.

 

Denis Seznec :

A la une de « Ouest Eclair », le 12 juillet, après l’arrestation de Monsieur Sezenec avec une faute d’orthographe, la police – je dis à peu près, hein de tête – est sur le point d’arrêter le véritable assassin sauf que des hommes politiques sont intervenus auprès de la Sûreté Générale pour indiquer sans vouloir faire pression sur la police ou la justice que cet homme soupçonné ne peut pas être coupable ! C’est quand même hallucinant de lire des choses comme ça. Vous ne pouvez pas écrire ça de nos jours. On est à la veille d’un… On voit que la Raison d’Etat arrive à ce moment-là ! »

 

 

Patrick Bocquet :

« Des forces, officielles ou non, elles s’exerçaient encore pendant la condamnation de Seznec pour éviter que la vérité fut mise à jour. C'est-à-dire qu’on trouvait encore dans des postes importants de La République, dans les années cinquante, des gens qui étaient des enfants ou en tout cas très proches idéologiquement de ceux qui avaient joué un rôle dans la même affaire Seznec en 1923. Donc, quand on est objectif, on doit dire que des francs maçons ont certainement tiré les ficelles en 1923-1924 d’une part, à une époque où de toutes façons tout le Gouvernement de la France était massivement tenu par la franc maçonnerie et où tous les postes les plus importants étaient en général tenus par des francs maçons. Mais aussi, et on ne peut pas être honnête si on ne dit pas cela également que beaucoup de francs maçons se sont engagés dans le sens de la vérité, dans le sens de la révision du procès Seznec. »

 

 

Roger Faligot, journaliste, spécialiste des Services Secrets, a étudié plus particulièrement cette période des années vingt, où les services de contre-espionnage ont eu fort à faire pour lutter contre l’activisme du nouveau pouvoir communiste en Russie. C’est là qu’il faut chercher la dimension politique de l’affaire Seznec Quemeneur :

« On peut estimer qu’il y a deux raison essentielles – et j’en vois pas d’autres - qui pourraient expliquer qu’il y avait une chape de plomb, comme vous dites, et peut être de retraits de documents importants pour l’enquête, c’est :

- qu’un notable important, relativement important, qu’était Quemeneur était mouillé dans une affaire qui est un peu sordide, si vous voulez, qui est un trafic de magouillage avec quelqu’un qui avait une réputation un petit peu discutable qu’était Seznec ;

- la deuxième explication qui mériterait d’être creusée beaucoup plus, c’est qu’au fond ce trafic-là n’était pas un petit trafic sordide simplement pour avoir quelques sous de plus mais que c’était une filière très importante. Peut-être que Seznec et Quemeneur n’en avaient pas le sentiment, ne le savaient pas forcément, c’est ça qui est important, mais c’est une filière à travers un énorme marché clandestin parallèle qui était en direction d’un pays qui était l’objet d’un blocus et qui était singulièrement l’Union Soviétique, à l’époque. »

 

Roger Faligot a trouvé dans les archives américaines une photo de Félix Dzerjinski, chef de la Guépéou, la police secrète de Lénine, c’est pour le moment, le seul élément tangible d’un trafic de Cadillac vers la Russie Soviétique en 1923 :

« C’est tout de même bizarre que des chefs bolcheviks, des chefs de la Révolution Soviétique, aient ce type de voiture. Mais ça prouve que, effectivement, ils avaient réussi à contourner l’embargo. Qu’ils arrivaient à s’approvisionner en matériel, pas seulement des tracteurs, pas seulement du blé, pas seulement de l’armement, etc… mais aussi, et vous voyez, en l’occurrence des voitures de luxe, exactement le même type et le même modèle que les Torpedo Cadillac qui sont incriminées dans l’Affaire Seznec. »

 

 

L’affaire Quemeneur Seznec, petit meurtre de province ou grande affaire d’Etat ? Le dossier reste controversé. Pour en avoir le cœur net, Marylise Lebranchu, élue locale de Morlaix, mais aussi, Garde des Sceaux en 2001, a relancé le débat en demandant la révision du procès de Seznec :

« Au début, on disait « bâclé. Puis après, on a commencé à dire « enquête un peu sabotée » par Bonny ou d’autres. Quand la Justice provoque des blessures dans une société, c’est très mauvais. Vous savez que, je dis toujours : la société c’est un patchwork, c’est cousu avec du fil, de temps en temps le fil casse et la Justice est là pour recoudre. Et là elle a mal cousu, donc ça va continuer à craquer tout le temps. Donc, c’est pas bon. Il faut qu’il se passe quelque chose, c’est pourquoi j’ai été conduite à demander, plus solennellement, parce que j’avais cette chance d’être Garde des Sceaux, la révision. »

 

 

On ne saura probablement jamais ce qu’est devenu Pierre Quemeneur. Aujourd’hui une bonne dizaine d’hypothèses courent sur sa disparition mystérieuse.

Quant à Seznec, les nombreuses demandes de révision du procès ont toutes été déboutées. La Justice estime que les faits nouveaux présentés par la famille ne sont pas suffisamment crédibles pour déclencher une procédure nouvelle.

L’élément capital attendu de l’ultime requête en révision, à l’initiative du ministre de la Justice, c’est qu’elle puisse ouvrir les archives des Services Secrets français. On saura alors si l’affaire Quemeneur Seznec est bien une affaire d’Etat. Dans ce cas, il ne peut s’agir que d’une manipulation policière, des pièces essentielles et des noms auraient été cachés à la Justice et si la Justice a été manipulée, elle n’aurait pas à rougir de s’être trompée et de le dire.

 

 

Autant dire que c’est un dossier qui est loin d’être refermé, Bernard, vous avez rapporté, dans l’enquête qu’on vient de voir, des documents inédits. Bravo pour ça, parce que c’est un vrai travail de fourmi aussi. Rien ne dit qu’il n’y aura pas encore d’autres documents inédits qui vont ressurgir un jour ?

 

- Tout à fait. Moi, j’aurais envie de fouiller un petit peu du côté de la diaspora bretonne à Paris. Puisque il me semble que là il y avait des connections entre Quemeneur, Seznec et les gens, les Bretons qui étaient à Paris et qu’ils connaissaient, qui n’a pas du tout été fouillé.

Puis, il y a une deuxième chose : c’est évidemment des documents des Services Secrets français parce que, s’il y a eu effectivement trafic de Cadillac vers la Russie, il y a des traces dans les archives de la D.S.T., etc.. Ces archives-là ont eu une vie un peu compliquée parce qu’elles sont allées à Moscou, elles sont revenues. Est-ce qu’il existe encore des papiers ? Normalement les deux avocats de Denis Seznec, de la famille Seznec donc, sur la demande du Garde des Sceaux, auront le droit d’aller voir ces documents inédits. Qu’est-ce qu’il en ressortira ? On n’en sait rien. C’est tout l’intérêt de la révision qui est en cours.

 

- Et votre conviction dans cette affaire ? Vous avez un point de vue ?

 

- Alors ça fait deux ans que je travaille sur ce dossier-là à partir donc des documents originaux dont j’ai eu la primeur, un peu, pour un journaliste d’aller au fond de ces documents et il me semble que plusieurs fois je suis revenu sur des convictions. Je me suis dit plusieurs fois : c’est sûrement ça et puis en fait d’autres documents arrivent derrière qui… Et l’affaire Seznec est terrible parce qu’il y a au moins dix endroits où Quemeneur est enterré. Dix endroits où il est mort. Et où il y a des journalistes, il y a des gens localement qui croient que dur comme fer que c’est ça : Le problème c’est que s’il est mort à Plourivo, il n’est pas mort à Paris, il n’est pas mort à Houdan. Donc, une hypothèse casse l’autre…

 

- Une hypothèse, un spécialiste, une thèse, à chaque fois…

 

- C’est chaque fois ça qui fait que depuis 80 ans l’affaire Seznec rebondit sans cesse puisqu’on a toujours pas la clé des mystères.

 

- C’est marrant, vous parlez de l’affaire Seznec tout au long de votre enquête Seznec et Quemeneur étaient la main dans la main, hein, leurs parcours se croisent. Et effectivement on parle de l’affaire Seznec mais est-ce qu’il n’y a pas aussi une affaire Quemeneur ?

 

- Tout à fait. L’affaire Seznec a éclipsé l’affaire Quemeneur. L’affaire Quemeneur, c’est celle avant le procès, après le procès, on peut crier à l’erreur judiciaire, c’est ça l’affaire Seznec. L’affaire Seznec, c’est de dire : « Seznec est innocent ».

 

- Mais il y a quand même la personnalité de Quemeneur ?

 

- Il y a Quemeneur. Et Quemeneur, on n’a pratiquement rien, puisque tous les livres qui ont été écrits pratiquement vont pour clamer l’innocence de Seznec. Or on n’a pas beaucoup cherché du côté « Quemeneur »…

 

- Et il fallait creuser un peu plus…

 

- Oui. Parce que Quemeneur est un personnage dont on ne connaît pas grand-chose et de ce que j’ai pu trouver c’est vrai qu’il était largement main dans la main avec Seznec sur une affaire de trafic de Cadillac. Qui était un trafic tout à fait illicite a priori. Mais visiblement qui a mal tourné avec des contacts un peu douteux du côté de Paris.

 

- Est-ce qu’on peut dire qu’à l’époque déjà c’était une affaire médiatique et que c’est toujours une affaire médiatique, l’affaire Seznec Quemeneur, on va dire ?

 

- Oui, Parce que dès le départ, les enquêteurs ont travaillé avec une meute de journalistes autour d’eux. C'est-à-dire dans les premiers articles de presse, on trouve beaucoup d’hypothèses de Quemeneur dans tous les sens, et puis après, quand la famille Seznec a commencé à lutter pour l’innocence de Guillaume Seznec, c’est pareil, ils vont d’abord voir les medias et après ils vont faire des requêtes pour des révisions en justice. C’est toujours les medias qui mettent en avant les possibilités autres mais jamais la justice et je pense que la justice en a pris ombrage depuis 80 ans…

 

- Et c’est ce qui fait aussi qu’il y a toujours une affaire qui existe !

 

- Et tout à fait..

 

-  Merci beaucoup, Bernard.

 

FIN

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E
Toutes ces hypothèses ne remettent jamais en cause les faits sur lesquels les jurés ont construit leur conviction. Guillaume Seznec savait que Pierre Quéméneur ne réapparaîtrait jamais. Il a rédigé une fausse promesse de vente et créé une fausse piste. Il n'a jamais pu donner une chronologie cohérente de ces quelques jours le disculpant. Au lieu de se construire un alibi, il a fourni un mobile à ses accusateurs.
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